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Face à Internet, la télé est-elle démodée ?

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Culture

L’audience des chaînes de télé européennes diminue, et pourtant les consommateurs n’ont jamais été aussi avides de nouveaux contenus. Mais l’offre se fragmente d’un écran à l’autre. Analyse.

C’est la crise chez TF1, la plus grande chaîne de télévision commerciale en France : le fameux journal de 20 heures, véritable institution, passe inexorablement sous la barre symbolique des 30 % de parts de marché. Pendant des décennies, le journal télévisé du soir a été le rendez-vous familial par excellence d’une vaste majorité de ménages français. Une baisse qui pourrait paraître anecdotique mais qui révèle un changement bien amorcé dans les habitudes des consommateurs. Et laisse apercevoir de nouveaux modèles économiques (revenus publicitaires) associés.

Je regarde ce que je veux

Partout en Europe, le consommateur est face à une offre pléthorique de chaînes de télévision et les audiences diminuent du fait de la fragmentation des consommations. Pourtant nous n'avons jamais autant consommé de médias, mais la tendance est désormais au « à la carte » : je regarde ce que je veux quand je veux, et non ce qu'on m'impose. Ainsi, toutes les grandes chaînes hertziennes suivent le mouvement et proposent ou vont proposer une formule de « catch up TV » pour permettre de visionner son émission ou sa série préférée à l'horaire de son choix.

Aux Etats-Unis, le système TiVo s'est popularisé. Il permet d'enregistrer les programmes pour les regarder plus tard quand on le désire, avec possibilité de zapper les coupures publicitaires. Dans la même lignée, les systèmes de video on demand (VOD) fleurissent à grande vitesse partout en Europe, et leurs catalogues s'épaississent chaque jour. L'observatoire européen de l'audiovisuel dénombre pas moins de 250 services VOD fin 2007 en Europe, 100 de plus que l'année précédente.

TF1 accuse Youtube

Pour la première fois depuis des décennies, les jeunes regardent de moins en moins la télévision, au profit d'Internet (chat, réseaux sociaux, blogs, …) et du mobile. 30 % des jeunes de 8 à 14 ans utilisent leur ordinateur en même temps qu'ils regardent la télé. Plutôt que d'allumer MTV, il suffit d'aller sur Youtube pour enchaîner les vidéos musicales. Les sites de diffusion de vidéo ont pris une importance considérable en quelques années. Youtube, Dailymotion et consort représentent à eux seuls plus du tiers de la bande passante globale du web.

Les chaînes classiques ont perdu en un an 10 % de parts d'audience chez les 15 à 34 ans. Les tentatives pour enrayer le phénomène ont consisté dans un premier temps à porter plainte : TF1 a attaqué Dailymotion et Youtube et leur réclame en tout 100 millions d'euros. D'autres ont tenté de passer des accords comme Canal Plus et Dailymotion. Le groupe TF1 a lancé sa propre TV Web, baptisée Wat TV pour concurrencer les mastodontes de la vidéo sur le Net. Une autre méthode est le catch up TV : un site Web sur lequel l'internaute peut visionner les programmes de la chaîne à n'importe quelle heure, afin de s'adapter à ces nouveaux modes de consommation de media.

Track des consommateurs

(mastrolindo.it)Internet est-il donc l'avenir de la télévision ? C'est en tout cas le pari qu'ont fait Janus Friis et Niklas Zennstrom, célèbres sur le Net pour avoir développé Skype et Kazaa, en créant leur plate-forme Joost. Joost est une application basée sur une architecture « peer to peer » qui permet de visionner des contenus audiovisuels. L'interface laisse une grande place à l'interactivité puisque l'utilisateur a le choix entre de très nombreuses émissions, mais peut également se constituer des playlists, ou encore participer aux programmes, en postant des commentaires ou en votant.

Intéressant pour les utilisateurs, le système l'est également pour les annonceurs : possibilités de ciblage affiné des publicités (en fonction des habitudes de visionnage de l'utilisateur et de son historique de navigation), tracking poussé des consommateurs (du moment où il voit l'annonce jusqu'à son parcours sur le site marchand de l'annonceur). Finie donc l'époque où le marchand de lessive inondait tous nos écrans de son message, il pourra à l'avenir ne le diffuser qu'aux personnes susceptibles d'être intéressées, réduisant ses coûts et augmentant l'efficacité de ses campagnes.

Une personnalisation à l’infini

Joost a connu un fort succès d'estime au moment du lancement de la version beta l'an dernier. Mais depuis, les audiences ne décollent pas, et des concurrents ont émergé : on peut citer par exemple Hulu, émanation de News Corp et NBC (et qui à ce titre bénéficie du contenu de ses actionnaires) dont les audiences ciblées commencent à attirer fortement les annonceurs. On peut également citer l'initiative commune d’Intel et Yahoo pour proposer de nouvelles applications Internet directement sur le téléviseur de salon : l'idée est de permettre d'afficher en surimpression de l'image un certain nombre de widgets personnalisés (des petites fenêtres qui rapatrient de l'information, comme la météo, les conditions de circulation, les programmes TV...)

C'est donc vers ce type de plateformes, mélangeant TV classique et Internet, que va évoluer la télévision telle que nous la connaissons : l'interface ressemblera donc à celui d'une TV classique, avec en plus diverses fenêtres d'information provenant de multiples sources, y compris des diverses communautés auxquelles appartient le spectateur, qui pourra les personnaliser à l'infini.