Education Française vol.1 : Travail, Famille, Patrie
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Le 5 novembre a marqué la sortie d’un projet d’envergure dans la promotion du Made In France. Ce mois-ci, ce n’est pas une marinière zébrée ni un robot Moulinex qui polira votre amour de la Patrie mais bel et bien un disque. Explication.
« C’est en temps de crise que l’on créé le plus. » Cette expression complètement apocryphe et qui ne sert qu’à rassurer votre pote intermittent lorsqu’il cuve dans un bar du 20ème en happy hour, illustre parfaitement l’état d’esprit d’une tripotée de prétentieux désireux de nourrir le chaland avec de nouvelles sensations. Alors que la France s’installe de mieux en mieux dans la dépression (1 Français sur 2 ne va pas trop bien en 2012), il y aurait « un moment » comme ça où quelque chose s’épanouirait du néant. Puis paraît-il que la fleur du désert serait regardée comme un oasis d’avant-garde. Mirage ?
Entre hardiesse et superbe
C’est en grande partie sur ce sol sablonneux que s’est bâti le projet d’une compilation consacrée à la pop française et intitulée Education française vol.1 (Sony/Columbia), sortie le 5 novembre dernier. Tout part d’un postulat : « Après 10 ans de vaches maigres, des groupes éclosent aux 4 coins de l’Hexagone », confient Philippe Gandihlon et Jean-Daniel Beauvallet, les initiateurs du projets. Les anciens apprécieront, coucou à Noir Désir. Mais outre l’outrecuidance, la démarche a un but : prendre une « photographie, complète et exigeante, de ce mouvement en marche. »
Dont acte. L’histoire ne nous dit pas si les groupes qui capitonnent le disque sont conscients ou pas d’être les hérauts d’une révolution musicale dans leur pays. Mais comme l’hagiographie française nous dit aussi que la prétention se bonifie avec l’âge, admettons que chaque artiste a été contacté avant de figurer sur la pochette. En définitive, 20 « agités du local » (la personne qui a rédigé le communiqué de presse bosse aussi chez Monoprix) parsèment la compilation qui en plus de prendre une photo, aura fait l’effort de quadriller tout le pays. Sauf les DOM-TOM, bien entendu.
Au mappage : Concrete Knives, Lescop, The Shoes, La Femme, Lou Doillon, Hyphen Hyphen, The Bewitched Hands, Granville, Woodkid et on en passe évidemment. Autant de formations made in France, plus ou moins installées dans le landerneau musical, qui se succèdent par l’intermédiaire de morceaux choisis soit en raison de leur intitulé (« Brand New Start » de Concrete Knives « Someone New » de Von Pariahs), soit de leur résonnance asurée au sein du public (« La Forêt » de Lescop « I.C.U » de Lou Doillon). Une compilation quoi. Mais justement : une compilation. Permettez-nous d’insister sur le terme parce que de mémoire d’homme, les rares tentatives de promotion de la France par la voix consistaient surtout en tragiques bides humanitaires (jurisprudence Chanteurs sans frontières voire Sol En Si ).
Orgueil et préjugés
Il ne s’agit pas de ça ici. Mais force est de constater qu’un héritage est parfois lourd à porter lorsqu’il est question de représenter son pays avec des mots aussi empathiques que « nouvelle pop sans complexe ». Alors, comment sonne la Nation ? Trêve de circonlocutions, l’honneur est bel et bien sauf. On doit dire que là où beaucoup attendait de la piquette, ce condensé de pop française a de l’allure. Les petits soldats réunis sur l’album prouvent avec une certaine idée de la classe que les méthodes empiriques initiés par la French Touch ont procrée de jolis bébés éprouvettes. La vingtaine de petites têtes blondes, au-delà d’un talent certain pour produire de la mélodie, démontrent qu’une ligne d’accord requiert une bonne dose de travail. Et à l’inverse de beaucoup d’ainés cosmétiques, les godelureaux de la pop française soignent leurs sons autant au niveau de la voix que sur le plan des arrangements.
La préparation du disque avait pointé une chose : bon nombre de groupes ont déjà rendu de bonnes copies, chacun dans leur coin. On pense aux opus des Rémois The Shoes, Crack My Bones et des Bewitched Hands, Vampiric Way ; du Rochelais Lescop, Lescop ou encore du Parisien Damien avec Flirt. Bien sûr, les esprits les moins patriotiques chasseront l’intrus, le Lou dans la bergerie. Suivez mon clic.
Qu’importe, cette Education française vol.1, sans être parfaite, pourrait bien donner quelques leçons à ceux qui pensent encore que le rock français est du vin anglais. Résolument hipster-compatible (donc virale), reste à savoir si la jeune garde aura suffisamment d’échos pour teinter outre-Manche. Avec toute la forfanterie du monde, profitons de cet élan nationaliste pour chatouiller des Anglais incapables depuis des lustres de nous chier une idée neuve. De toute façon, le monde a bien changé depuis. Selon Gandihlon, les Japonais veulent déjà sortir la compilation. Banzaï !
En concert : Le 30 novembre au Trabendo, Tsugi Super Live et Education Françaiseprésentent La Femme (dj set), The Popopopop's, Saint Michel, Isaac Delusion, Equateur, FI/SHE/S
"Education Française" compilation de 20 titres (Columbia/Sony)
Tracklisting :
01Concrete Knives : Brand New Start02Lescop : La Forêt03St-Michel : Katherine04Singtank : Superstar05The Shoes : Wastin Time06Séverin : La Revanche07The popopopops : R'n'R08Equateur : Haunted09Bengale : Le dernier Tramway10Von Pariahs : Someone New11Pegase : Without Reason12La Femme : Sur la planche13Caandides : Rio14Lou Doillon : I.C.U15Hyphen Hyphen : Major Tom16Damien : Drague17The Bewitched Hands : Thank You, goodbye, it's over18Granville : Jersey19Juvenile : Through the Night (yuksek rmx)20Woodkid : Brooklyn