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Donald Trump décoiffe-t-il les jeunes européens ?

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Politique

Donald Trump montre un peu plus chaque jour que la blague a assez duré. Jadis moqué, le milliardaire dispose aujourd’hui de grandes chances de remporter l’investiture républicaine et a fini par prouver qu’il était un candidat crédible à la présidence des États-Unis. Avant que ne sonnent les trompettes de la renommée, comment les jeunes européens perçoivent cette irrésistible ascension ?

Le 9 avril dernier, le Boston Globe publiait une fausse une sur laquelle Trump trônait en président des États-Unis. Après des mois de running gag et d’une campagne continue de déstabilisation – savamment orchestrée sur le Web – la blague a assez duré. Elle a même fini par ne plus être très drôle. Un mois après, Donald Trump pourrait bien remporter l’investiture républicaine, concourir pour la présidentielle américaine et donc devenir le président de la première puissance du monde. 

Car depuis peu, beaucoup de faits rendent celui qu’on appelle « le Donald » très sérieux. Ses victoires dans la course à l'investiture républicaine d’abord, mais aussi cette étude menée par Five Thirty Eight qui montre que les électeurs de Trump ont un niveau d’éducation supérieur à la moyenne des Américains. Outre-Atlantique aussi, le succès du magnat de l’immobilier a fini de faire sourire. Désormais, l’ascension de l’homme et de sa coiffure sushi-saumon fait même un peu peur. Pour savoir comment les jeunes européens perçoivent le Donald, nous avons donc interrogé Michael - prof anglais de 29 ans -, mais aussi Niccolò - 25 ans, qui travaille pour un gros fabricant d'électronique - l’Italienne Martina qui à 22 ans, étudie le cinéma - et enfin Mia – lycéenne française de 17 ans.

cafébabel : Selon vous, qu’est-ce qui cloche avec Donald Trump ? 

Michael : Hormis son ignorance, son utilisation à tout va de la rhétorique et son langage simpliste, a priori rien, puisqu’il semble si populaire. Auprès des Américains conservateurs, j’imagine donc que ça dépend à qui on s’adresse.

Niccolò : Trump est totalement inapte à gouverner un pays ou une équipe de personnes qui ne fait pas partie d'une entreprise. Pourquoi ? Parce qu'il dit ce qu'il pense d'une façon survoltée. Il croit avoir la vérité suprême et ne prend pas le temps de penser avant de parler. Ce n'est pas une personne réfléchie, or c'est une qualité qu'un leader - et encore plus le président des États-Unis - doit absolument posséder.

Martina : C’est un potentiel futur président raciste et macho qui essaye de séduire les électeurs en jouant avec les craintes et les inquiétudes typiques des Américains en matière de terrorisme.

Mia : Donald Trump veut vivre dans le passé, à l’époque où tout le monde était pareil et où les différences étaient prohibées. Il prétend savoir comment rendre les gens plus heureux sans même avoir une seule fois prononcé le mot « acceptation » ou « amour ». Certaines de ses idées sont un peu extrêmes et rappellent les pays gouvernés par des dictateurs. Il affirme connaître la situation des États-Unis mais c’est un milliardaire plein de pouvoirs. J’ai donc du mal à comprendre comment il peut savoir quelle est la situation de son pays. Il n’a pas le point de vue d’un Américain moyen. Je pense que c’est son plus gros problème.

cafébabel : Alors pourquoi les Américains lui accordent autant de crédit d'après vous ?

Michael : Si tu sous-entends pourquoi est-il si populaire, c’est probablement parce que ses propos font écho auprès de la classe ouvrière et de la classe moyenne conservatrice américaine. Ces personnes se sentent oubliées ou privées de leurs droits. Selon elles, Trump incarne l’honnêteté, l’anticonformisme, et se démarque des régimes précédents.

Niccolò : Sincèrement je ne sais pas de quel crédit il s'agit.

Martina : Je peux comprendre. Maia ça me laisse perplexe, je ne l’accepte pas…

Mia : Pour être honnête je suis surprise que les Américains accordent autant de crédit à Donald Trump. Je ne comprends pas vraiment pourquoi. C’est peut-être parce qu’aux États-Unis beaucoup de gens croient en un christianisme intégriste et cherchent donc à retrouver le style de vie traditionnel du début du 20ème siècle. Ces personnes croient donc aux mêmes croyances que Trump exprime. 

cafébabel : Pensez-vous qu’il faille forcément faire le show pour gagner des voix ?

Michael : Un des principaux attributs des grands dirigeants, c'est probablement le charisme. Tout spécialement aux États-Unis où l'image des politiques est beaucoup plus analysée. La coiffure de Trump est un bon exemple.

Niccolò : Être un showman aide indubitablement à gagner des votes : les gens ont besoin d'une personne à qui ça ne pose pas de problème de parler en public et qui lance de nouvelles choses. Une phrase représente bien la classe moyenne : « Le peuple est le fils de la pensée des autres ». Beaucoup de personnes ont donc tendance à écouter quelqu'un qui a quelque chose à dire, d'autant plus si cette personne réussit à dire les choses de façon captivante, comme un showman. Mais je ne crois pas que la façon qu'a Trump d'être un tribun soit payante parce qu'il ne transmet pas de sérénité ou de sincérité. On a tous besoin de ces choses-là.

Martina : Absolument pas. Les gens devraient choisir un président en fonction de son honnêteté, sa rationalité, son intelligence, sa décence, et surtout de son humilité. 

Mia : Je pense que pour gagner les élections présidentielles, un candidat doit être conscient que la promotion de son programme est primordiale. Je crois donc en effet qu’un candidat doit faire le show pour gagner des voix.

cafébabel : S’il était élu, comment la politique étrangère européenne se modulerait-elle selon vous ? Pensez-vous que la politique de Trump pourrait connaître « un effet boule de neige » en Europe ?

Michael : Je ne sais pas comment les choses évolueraient mais l’Union européenne et chaque pays devraient réévaluer les rapports qu’ils ont avec les États-Unis, vis-à-vis de la Chine et des autres acteurs mondiaux. Plus particulièrement en matière de commerce et de défense.

Les leaders populistes comme Trump reviennent de temps à autre, spécialement en période de crise économique ou sociale. Ça pourrait par exemple être le cas en France, en Allemagne et en Autriche. Mais dans la plupart des pays européens, le système du multipartisme freine la montée des partis populistes. Du coup, ces derniers restent cantonner à « un feu de paille » et à exercer un attrait limité sur leur public cible. C'est notamment ce qu’a fait David Cameron avec le Parti pour l’indépendance du Royaume-Uni (UKIP). 

Niccolò : Je pense que la politique étrangère européenne ne changerait pas tant que ça. Elle verrait Trump comme un météore, rien de plus. 

Martina : Je n’en ai pas la moindre idée. J’espère juste que l’Europe ne sera pas influencée par ses idées.

Mia : Si Donald Trump devenait le président des États-Unis, ça pourrait en effet remettre en cause la politique européenne. L’Amérique du Nord a déjà beaucoup d’influence sur l’Europe. Certaines lois proposées par Trump pourraient donc avoir des répercussions sur nous. 

cafébabel : Quelle serait ta meilleure punchline pour clouer Donald Trump ?

Michael : Contentez-vous de l’écouter parler.

Niccolò : Il est habile comme un singe pour avancer. Et vous êtes les lianes.

Martina : Trump, un drapeau qui flotte ? (cf. sa coiffure again

Mia : Je ne veux pas ridiculiser Trump. Je ne pense pas que ça soit important. J’aimerais juste souligner que c’est étrange qu’un fils d’immigrés (sa mère est écossaise et ses  grands-parents paternels sont allemands, ndlr) veuille chasser les immigrés des États-Unis.

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Tous propos recueillis par Cécile Vergnat.