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Croissance et emploi, orphelins d'Europe ?

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Default profile picture ian bruff

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Default profile picture raphael rouby

Même après le sommet de Berlin, les discussions sur la mauvaise santé de l'économie européenne font toujours l'impasse sur le principal obstacle à la croissance et à l'emploi en Europe : la BCE.

Rêvons un peu ! Vous rappelez-vous le sommet de Lisbonne en mars 2000 ? Dans un bel élan, tous ses participants s'accordaient pour prédire que l'UE allait devenir la région la plus dynamique et la plus compétitive du monde d'ici 2010, grâce à l'adoption de l'euro et à des réformes économiques de grande ampleur. Mais cette vision optimiste semble pour l'instant démentie par les faits… Dès la fin de l'année 2000, l'éclatement de la bulle de l'économie américaine a sérieusement affecté la plupart des économies européennes. Les effets de cette crise ont atteint leur sommet en 2001 et 2002, mais l'économie européenne stagne encore aujourd'hui, alors même que la plupart des autres pays développés (y compris le Japon) ont renoué avec la croissance.

SuperCommissaire à la rescousse

Le sommet de Berlin de la semaine dernière a cherché à relancer le « processus de Lisbonne ». On y a parlé de la nomination d'un « supercommissaire » qui superviserait les réformes économiques et mettrait en place un calendrier commun. Ce calendrier reprendrait en fait les grandes lignes de la stratégie définie à Lisbonne : promouvoir la libre entreprise, accroître la flexibilité du marché de l'emploi, favoriser l'« économie de la connaissance » et défaire les réglementations non nécessaires.

Cependant, pour judicieux qu'il soit, ce programme oublie de prendre en compte une donnée essentielle. En effet, le débat autour de l'économie européenne omet trop souvent la Banque Centrale Européenne. Elle est pourtant sans conteste l'acteur le plus important de la zone euro. Cet « oubli » ne laisse pas d'étonner : pourquoi n'y a-t-il personne pour remettre en question le rapport obsessionnel qu'entretient cette institution avec le taux d'inflation, au nom duquel la BCE a largement handicapé l'économie européenne en brisant son dynamisme ? Avons-nous perdu de vue la croissance économique et la création d'emplois ? La grande dépression de 1930 aurait-elle été reléguée aux oubliettes de l'histoire ?

La BCE « seulement » autonome ?

Face à ces critiques, la BCE possède une réponse invariable qu'elle assène régulièrement avec une foi indéfectible : sa seule responsabilité est de maintenir l'inflation à un niveau minimum afin de réunir les conditions nécessaires aux entreprises pour créer des emplois et permettre ainsi le retour de la croissance. Si le taux de chômage reste élevé, c'est parce que les gouvernements nationaux ne font rien pour aider – bien au contraire ! – les entreprises qui augmentent leur production et créent des emplois. Cette analyse est partiellement juste, mais elle est aussi partiale. Les politiques monétaires peuvent et doivent être utilisées intelligemment : en période de récession, elles doivent aider à relancer l'économie et, à l'inverse, elles doivent permettre d'éviter la surchauffe pendant les phases de croissance.

Que faire pour sortir de cette impasse ? Deux solutions s'imposent. Il faut agir sur le débat européen à propos de la politique monétaire et amener la BCE à promouvoir la croissance et l'emploi tout en maintenant l'inflation à un niveau raisonnable. Deuxièmement, il convient de s'interroger sur le statut de la BCE : doit-elle vraiment être complètement indépendante par rapport au pouvoir politique ? La Banque d'Angleterre, par exemple, est « seulement » autonome par rapport au gouvernement, ce qui la rend responsable de ses décisions devant le gouvernement et la population tout entière. Il est vrai que le reste de l'Europe penche plutôt en faveur de l'indépendance des banques centrales, mais plus l'apathie de l'économie européenne se prolonge, et moins nous pourrons nous contenter des réformes proposées à Lisbonne et à Berlin.

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Translated from Who Cares About Growth and Unemployment?