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Coupe du monde : la guerre des clones

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Style de vieDossier spécial Coupe du Monde

Les équipes de foot comptent des joueurs qui res­semblent de plus en plus à leurs ju­meaux en ver­sion Plays­ta­tion. De la même manière, le jeu vidéo est de plus en plus proche de la réalité. Est-ce à dire que le sport réel se trans­for­me­rait en jeu vir­tuel ?

De nos jours, lorsque l’on ex­prime son ad­mi­ra­tion pour un joueur de foot­ball comme Lio­nel Messi, on dit au mieux : « c'est un joueur de Plays­ta­tion ». Bien évi­dem­ment, ces mêmes foot­bal­leurs pro­fes­sion­nels jouent aux jeux vidéo en de­hors du ter­rain. D’ailleurs, de nom­breux joueurs pensent que s’adon­ner ré­gu­liè­re­ment aux jeux vidéo aug­mente leurs chances de suc­cès sur le ter­rain. 

Au pre­mier coup d’œil, on se rend compte qu’il n’y a guère de dif­fé­rence à l’écran entre le jeu de si­mu­la­tion et la re­trans­mis­sion de la Coupe du Monde au Bré­sil. Les concep­teurs EA du jeu vidéo FIFA 2014 ont réussi à cap­tu­rer les ex­pres­sions et les mou­ve­ments de ces stars mon­dia­le­ment connues, à tel point que l’on pour­rait prendre les ori­gi­naux pour des « co­pies ». La gé­né­ra­tion des joueurs d’au­jour­d’hui n’est-elle consti­tuée que d'ava­tars ?

Nike : la ma­chine à cau­che­mars

La marque d’ar­ticles de sport Nike a ré­cem­ment dif­fusé un spot pu­bli­ci­taire épa­tant. Pour sau­ver le foot­ball, Cris­tiano Ro­naldo, Ney­mar et In­iesta - entre autres - forment une équipe qui doit af­fron­ter des clones conçus par Per­fect Inc. qui « ne risquent rien » (à l’in­verse des joueurs de l’équipe Nike qui, eux, prennent « tous les risques »). Le deal : si les ori­gi­naux perdent contre les clones, ils sont as­su­rés de ne plus ja­mais jouer au foot­ball. Au cours d’un match dra­ma­tique, nos héros fi­nissent par s’im­po­ser face à leur copie. Le créa­teur des clones, aux faux airs de Steve Bus­cemi, s'en re­trouve hor­ri­fié. Bref, une belle his­toire avec une happy-end. Seule­ment, la marque Nike a elle-même uti­lisé ac­ti­ve­ment de ses rouages mar­ke­ting afin de trans­for­mer les joueurs de foot­ball en créa­tures vir­tuelles. La marque amé­ri­caine a déjà re­bap­tisé Cris­tiano Ro­naldo « CR7 », en ré­fé­rence à R2D2 de La Guerre des Étoiles. D’ex­pé­rience donc, Nike fa­brique elle-même les clones, au lieu de les vaincre.

On pré­tend que Nike s’em­pare aussi de l'évé­ne­ment d'une main in­vi­sible, en spon­so­ri­sant les équipes. Les ru­meurs vont bon train, d’au­tant que la marque prend parti pour ses icônes pu­bli­ci­taires contre la vo­lonté de leur en­traî­neur sur le ter­rain. Qui tire alors les fi­celles ?

Spot pu­bli­ci­taire Nike - Le Der­nier Match

DANS LA CA­VERNE DE PLA­TON

Re­tour au Bré­sil. Pen­dant le match d’ou­ver­ture à Sao Paulo qui op­po­sait le pays or­ga­ni­sa­teur à la Croa­tie, nous n’ar­ri­vions pas à en croire nos yeux, trou­blés par les ef­fluves de bière. Était-ce les vé­ri­tables joueurs qui ré­cla­maient une faute au­près des ar­bitres et se rou­laient dans l’herbe au ra­lenti ? Il faut jeter un se­cond re­gard, plus cir­cons­pect, afin de com­prendre que nous, hommes pas­sifs, nous nous at­ten­dions peut-être à ce que ces joueurs règlent l’af­faire en chair et en os. Bra­qués par des cen­taines de ca­mé­ras, les joueurs se mon­traient sous tous les angles pos­sibles, de telle sorte que l'on pou­vait da­van­tage exa­miner les traits de leurs vi­sages que ceux de nos co­pines. La re­trans­mis­sion des matchs sur­passe la réa­lité, à tel point que les vrais joueurs pro­duisent un effet ir­réel. 

Est-il pos­sible que nous nous trou­vions tous cap­tifs dans la ca­verne du bal­lon rond de Pla­ton ? Nous re­gar­dons fixe­ment les ombres se dé­pla­cer sur des ter­rains de foot­ball vir­tuels, et nous les pre­nons pour de vé­ri­tables joueurs. L’illu­sion pré­ser­vée que nous avons du foot­ball n’est bonne que sur terre bat­tue, à la plage et avec des fi­lets, loin des grands stades. Du moins, c'est ce que l'on croit.

MERCI AUX ES­PA­GNOLS POUR LEUR DÉ­FAITE !

Grâce à leur dé­faite en Coupe du Monde, les cham­pions du monde es­pa­gnols nous ont li­bé­rés de nos chaînes. L’équipe, qui avait rem­porté la Coupe d’Eu­rope deux fois de suite et la Coupe du Monde en 2010, a rendu le foot­ball mé­ca­nique en in­car­nant le per­fec­tion­nisme. Ceux qui, ces der­nières an­nées, ont re­gardé un match de l’équipe na­tio­nale d‘Es­pagne ont pu re­con­naître le jeu d’une équipe de clones. Ils laissent pas­ser froi­de­ment la balle à tra­vers leurs lignes, jus­qu’à ce qu’elle trouve une ou­ver­ture. Ce genre de match res­semble da­van­tage à de la science qui souffle sur l’équipe un vent asep­tisé. Pour leur der­nier titre de cham­pions du monde, les Es­pa­gnols n’ont eu be­soin que de huit buts mar­qués en sept matchs. Ce n'est plus le cas au­jour­d'hui.

En l’es­pace de deux matchs seule­ment, le vent a tour­né. Les Pays-Bas et le Chili ont fait chu­ter l’équipe es­pa­gnole de son pides­tal, elle a dû prendre congé plus tôt que prévu. Le nau­frage des Es­pa­gnols ne pou­vait cer­tai­ne­ment pas être plus réel : la chute d’un géant face à l’ivresse in­at­ten­due de la vic­toire des lais­sés-pour-compte. Per­sonne ne vou­drait voir ce jeu aé­ro­dy­na­mique ré­sis­ter, comme c’est le cas dans la pub Nike. Un ins­tant im­prévu, puis l’ivresse de la vic­toire des ad­ver­saires : la ma­chine à foot­ball vir­tuelle ne re­con­naît pas le droit des faibles. Il est temps de ran­ger la Plays­ta­tion au gre­nier.

Translated from WM in Brasilien: Generation Playstation, go Home!