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Colombier linguistique : avoir pigeon sur rue en Europe

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Default profile picture Sophie Ehrsam

Tour de babelPolitique

Pourquoi le symbole de la paix est-il une colombe ? Pourquoi pas un pigeon ou une tourterelle (qui sont de la même famille) ? Peut-être parce que ces oiseaux sont associés à des expressions plus négatives que positives. Coup d’œil sur le colombier linguistique de l’Europe.

Au Royaume-Uni, on le sait bien : visuellement il n’y a pas grande différence, mais en termes de langue on distingue très nettement les deux espèces : les colombes (« doves ») sont blanches, petites, associées aux mariages ou à la paix. Le pigeon des villes (« pigeon ») ferait un symbole de paix assez incongru. Il ne ferait sans doute pas long feu, vu que les « stool pigeons » (indics) balancent volontiers de l’info à la police.

Les Français, quant à eux, associent clairement le pigeon au désavantage. Dans l’Hexagone on est le pigeon de quelqu’un (être le larbin de quelqu’un) ou on se fait pigeonner (on se fait avoir). Impensable en Allemagne, où les pigeons ne sont associés ni aux indics ni aux larbins. On préfère, modestement, avoir un moineau dans la main que des pigeons sur le toit (« lieber einen Spatz in der Hand als eine Taube auf dem Dach »). En Italie, c’est toujours une histoire d’avantage quand on prend deux « piccioni » d’un coup, selon l’expression « prendere due piccioni con una fava » (« faire d’une pierre deux coups »).

En Espagne on a plus de mal à se décider. D’un côté, les « palomas » (pigeons) font partie des animaux les plus détestés : « Serrano, paloma y gato, no hay animal mas ingrate » (« Il n’y a pas d’animal plus ingrat que les pigeons et les chats »). D’un autre côté Paloma est un prénom féminin populaire, et pas seulement depuis la chanson du chanteur argentin Andrés Calamaros.

Mais malgré les différences qui existent au sein du colombier européen, on s’accorde sur une chose : les pigeons sont comme des rats. À Berlin on est révulsé par les « Ratten der Lüfte » rats des airs ») dans les stations de U-Bahn, sur la Nollendorfplatz ou l’Alexanderplatz. À Paris on croise des rats volants. En Espagne on exècre les « ratas con alas » (rats ailés). Sur la place St Marc à Venise les « ratti del cielo » (« rats du ciel ») se jettent sur tout ce qui ressemble de près ou de loin à de la nourriture. Dans le monde anglophone ça confine à l’angoisse : les pigeons ne sont pas seulement des « rats with wings », ils sont liés à la mort même – « death on wings ». Et vous, vous avez pigé quoi à toutes ces histoires de pigeon ?

Photo : Une (cc)Xhanatos/flickr

Translated from Schlagabtausch im Taubenschlag