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BLOG ACTION DAY L'autre visage d'Andreas Baader

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Berlin

Sergio Marx

Un obsédé de la gâchette, amateur de bolides et coureur de jupon, vantard et dominateur : c'est l'image picaresque que la culture pop a forgé du chef de file de la Fraction Armée Rouge. Sa part de doute et sa relation ambiguë à la communauté homo du Berlin des années soixante restent, elles, méconnues.

Les yeux soulignés au crayon kôhl, un Baader presque androgyne s'élance pour prendre le micro offert par un travesti et entonne un air languissant. Dans ce club pour hommes de Schöneberg, il se sent chez lui. Si cette scène de Wer, Wenn Nicht Wir peut surprendre, elle montre un nouvelle facette du terroriste. « Pour beaucoup de spectateurs, Baader c'est Moritz Bleibtreu dans Baader-Meinhof-Komplex », estime le réalisateur Andres Veil qui cherche à recentrer le mythe.

Andreas_Baader.jpg N'ayant jamais connu son père, Andreas Baader fut très lié à son oncle, Michael Kroecher, un danseur et acteur homo. Il en tire une sympathie pour ce milieu et fréquente, dès son arrivée à Berlin en 1963, le Kleist – Casino. Dans Leicht muss man sein, Fliegen muss man können, un documentaire-hommage au photographe Herbert Tobias, l'ancienne gérante se rappelle de ce jeune trublion au pantalon serré qui draguait la clientèle pour ensuite décliner avec arrogance les avances de ses prétendants.

Tobias tirera quelques portraits de la forte-tête, torse nu, regard dans le vague, comme sortie du lit et vendra les clichés à une revue gay distribuée sous le manteau. Car jusqu'en 1969, l'homosexualité reste un délit en Allemagne et la police berlinoise n'hésite pas à faire des descentes. Une odeur de poudre qui séduisit sans doute aussi un jeune rebelle à la dérive.

Photo: Herbert Tobias