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Aujourd'hui précaire - et demain ?

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Le chômage des jeunes dans l'UE est deux fois plus élevé que celui frappant la population active. Processus de transition normal ou piège inextricable avec des conséquences à long terme ?

Hans Dietrich, membre de l´Institut de recherche sur le Marché de l´Emploi et de la Formation de Nuremberg (IAB) souligne une question cruciale, celle de la durée de la précarité. Après la fin des études, les petits boulots ou les emplois de courte durée ne sont pas un problème mais constituent plutôt une étape du processus de transition entre univers universitaire et monde du travail. Un passage qui prend un aspect différent en fonction du pays et du système de formation et qui se retrouve soumis à des fluctuations conjoncturelles. En règle générale, plus cette phase a lieu tôt, plus la transition se fait sans difficulté. Dans ce contexte, les stages et jobs étudiants sont synonymes de périodes d´essai ou de préparation à un emploi fixe. Selon une étude du Conseil économique et social, les deux tiers des Français débutent dans la vie active par un emploi à durée déterminée et 45% d´entre eux obtiennent à l´issu de cet emploi, un contrat à durée indéterminée chez le même employeur. La précarité, réponse logique à la rigidité des contrats d´embauche?

Le piège de la transition

La précarité devient problématique quand une multitude de jeunes gens peu qualifiés tombent dans le piège du travail sous-qualifié sans pouvoir envisager une quelconque perspective de formation continue. Selon Hans Dietrich, la probabilité d´un chômage ultérieur augmente alors rapidement pour ces individus. Les catégories les plus particulièrement touchées par ce phénomène sont les personnes non diplômées, les jeunes femmes et les enfants issus de l´immigration. C´est ainsi que le taux de chômage chez les jeunes Français ayant au mieux obtenu le brevet des collèges concerne en 2004 près de la moitié des sondés (43,4 %) 1 à 4 ans après la fin de leurs études, un taux 4 fois plus élevé que celui des diplômés du supérieur (11,9%).

Les analystes du marché du travail s’intéressent par ailleurs de plus en plus à ces jeunes qui multiplient les stages non plus pour accumuler de l´expérience professionnelle et parfaire leurs qualifications mais dans l’espoir de simplement gagner de l´argent. Une pratique qui soulève la question de l´image que les jeunes gens se font d´eux-mêmes ainsi que de leur chance d´évolution lorsqu´ils doivent traverser des périodes d´activité très courtes ou bien encore une parenthèse de chômage. Ils sont en permanence contraints de faire leurs preuves sans pour autant posséder des responsabilités. Sans compter que d´autres employés sont beaucoup mieux rémunérés pour un travail équivalent.

A côté du marché des « insiders » - caractérisé par un emploi sûr et des privilèges- et le marché des « outsiders » - celui des personnes non qualifiées et plus âgées - il semblerait qu´une troisième catégorie soit en train de voir le jour. Cette dernière concernerait plutôt les jeunes adultes flexibles et disposés à approfondir leurs connaissances mais pour qui l´accès sur le marché de l´emploi reste exclu en raison de leur statut difficile de débutants.

Les entreprises ne paient, la plupart du temps, aucunes charges salariales. De plus, dans certains pays de l´UE, les contrats renouvelés à la chaîne empêchent les revenus des salariés d´augmenter en raison d’une ancienneté impossible à comptabiliser. Les entreprises tendent enfin à embaucher des personnes surqualifiées pour un poste précis et à l´inverse, exclure des personnes formées précisèment pour ces emplois. Ce phénomène rend donc difficile l´accès au marché des étudiants diplômés dans des matières ne correspondant pas systématiquement aux besoins de l´économie.

Des conséquences tangibles

Chaque étudiant ne paye pas de cotisations sociales et n´acquiert ainsi aucun droit à une retraite. Une caractéristique qui renforce le déséquilibre entre cotisants et bénéficiaires des prestations, déstabilisant ainsi le très fragile système de sécurité sociale. En raison de l´augmentation de l´espérance de vie et de la durée des études, l´âge de la retraite ne cessera de s´allonger dans les années à venir. Si le système actuel devait subsister, celui qui a 30 ans aujourd’hui, ne possède aucun emploi fixe ou gagne insuffisamment sa vie ne pourra donc pas, 30 ans plus tard, prendre sa retraite en prétendant à une allocation complète.

Mais les jeunes qui vivent aujourd´hui dans des conditions économiques compliquées n'ont-ils pas tendance à moins consommer, une attitude les refoulant du même coup au ban de la société? Une étude effectuée par le IAB dans 10 pays européens montre qu´il n´existe pas de marginalisation des jeunes chômeurs. En effet, ceux-ci n´ont pas atteint un niveau de consommation élevé et bénéficient du soutien financier de leurs parents. On peut néanmoins se demander si cette absence de marginalisation se vérifiera encore dans les années à venir. Particulièrement si le chômage des jeunes subsiste ou bien lorsque cette « génération précaire » décidera d'avoir des enfants.

Quid d’ailleurs du taux de natalité dans l´UE ? Depuis une décennie, on constate que l´âge auquel les femmes conçoivent leurs enfants a largement reculé et l´insécurité lors de la période de transition conduisant à la vie active pourrait bien renforcer cette tendance. Etant donné le déséquilibre démographique croissant au niveau communautaire entre cotisants et bénéficiaires de prestations sociale, l´évolution de la situation s’annonce de plus en plus délicate.

Translated from Heute prekär – und morgen?