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Apprendre la religion sur les bancs de la fac

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Société

La théologie ou l’étude « des réalités relatives au divin »… Où peut-on étudier cette matière en Europe et qui paie ? Le public ou le privé ?

L’histoire de la théologie comme discipline universitaire n’est pas sans incidence. Elle a souvent fait l’objet de vives critiques au point d’être parfois supprimée comme ce fut le cas en Italie en 1875. Les critiques ont également été très acerbes en Allemagne. Néanmoins, les facultés de théologie, qu’elles soient catholiques, protestantes ou orthodoxes sont une constante du corps universitaire dans l’Union européenne. 

Financé par l’Etat au Portugal

En Europe, les instituts de théologie, d’universités privées ou d’Etat, bénéficient généralement de subventions et sont habilitées à délivrer des diplômes reconnus. Les facultés de théologie catholique des Universités de Leven et de Louvain-la-Neuve, en Belgique, sont intégralement subventionnées par des fonds publics. Le Portugal est le seul pays européen avec la France à avoir inscrit au sein même de sa Constitution le principe de séparation de l’Etat et de l’Eglise ; pourtant, la faculté de théologie catholique de l’Université de Lisbonne bénéficie d’un statut particulier depuis 1990, puisqu’en plus de s’insérer dans une université publique, il est financé par l’Etat.

En Espagne, les universités privées (qui sont essentiellement des universités catholiques) délivrent des diplômes reconnus par l’Etat. Les universités publiques sont pourtant habilitées à créer des facultés de théologie catholique. En Grande-Bretagne et en Irlande, les écoles de théologie, tout en restant indépendantes, sont reconnues ou intégrées dans l’université qui décerne les diplômes. Ailleurs en Europe, dans les pays nordiques et germaniques, aux Pays-Bas et en Grèce, les facultés de théologie font partie intégrante des universités d’Etat.

Le cas français

Seule la France fait figure d’exception : l’étude de la théologie y reste extérieure à l’université d’Etat depuis 1885. Pour Bernard Senelle, diplômé en théologie catholique, la laïcité française (qui est, selon lui, une des formes les plus radicales de laïcité) est « l’aboutissement non pas d’une séparation du pouvoir politique et du fait religieux en tant que tel mais d’un véritable combat anticlérical destiné à miner l’emprise de l’Eglise catholique sur la société ainsi que l’influence des militants politiques chrétiens. » Cette lutte a abouti en 1879 à l’interdiction d’enseigner pour les congrégations catholiques et à la proclamation d’une école publique, gratuite et laïque. 

Pourtant, la juridiction française qui s’attache à défendre un cadre légal sans équivoque pour la laïcité à l’école, a totalement ignoré l’enseignement supérieur. La fonction ecclésiastique n’y est pas un obstacle à la fonction d’enseignant. Certains y voient une aberration républicaine, d’autres, un signe fort de l’autonomie du corps universitaire. L’université s’envisage comme un endroit de liberté où les consciences ne sont plus des consciences en devenir mais des esprits formés, critiques et indépendants.

Dans la mesure où elle ne trouble pas l’ordre politique, économique et religieux, la liberté d’expression prévaut dans le sein des universités françaises. Pourtant, au niveau européen, l’absence de la théologie en France ne va pas sans poser de problème. L’harmonisation inhérente au processus de Bologne pose, en effet, le problème de la validation, en France, des diplômes canoniques obtenus à l’étranger.

Bernard Kouchner, ministre français des affaires étrangères et monseigneur Dominique Mamberti, secrétaire du Saint-Siège pour les relations avec les Etats, ont signé un accord sur la reconnaissance des grades et diplômes dans l’enseignement supérieur entre la France et le Saint Siège, le 18 décembre 2008, un accord sitôt dénoncé par les universitaires français qui y voient une atteinte à la laïcité.

Merci au PRISME-Société, Droit et Religion en Europe, une unité de recherche mixte relevant à la fois de l’Université de Strasbourg et du CNRS, qui a tenu une journée d’études sur le thème de la religion à l’université en Europe, le 30 janvier 2009.