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Appel pour une nouvelle génération de leaders

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Simon Loubris

Le double non de la France et des Pays-Bas le démontre : l’Europe a besoin de nouveaux leaders. Pour sortir de la terrible crise des idées qui la frappe.

Laurent Fabius a le sourire de ceux qui viennent d’abattre un carré d’as dans une partie de poker. Lors de sa première apparition télévisée après sa victoire au référendum du 29 mai, le leader du « non de gauche » à la Constitution annonçait avec nonchalance sa candidature aux élections présidentielles de 2007.

Sa campagne personnelle s’achève donc, logiquement, ainsi : sans appel pour une Europe sociale, sans initiative transnationale, sans conséquence politique sérieuse et véritablement européenne qui fussent, de quelque façon que ce soit, à la hauteur des « lendemains qui chantent » que le triomphe du « non » au traité constitutionnel appelait. Demeure l’instrumentalisation d’une Constitution désormais jetée aux oubliettes à des fins purement électoralistes de la part de celui qui a su parier sur le mal-être de larges couches de la population française et diviser le Parti Socialiste (PS), dont il est pourtant considéré comme le numéro 2.

Génération Fabius

Ce qui surprend dans la stratégie de Fabius, ce n’est pas tant l’indiscutable habileté du politicien que l’indifférence de l’homme pour le sort de l’Union européenne, considérée comme un moyen, un instrument pour remporter la course à l’Elysée. Leader historique de l’aile droite du PS, Fabius avait compris que le candidat socialiste des élections présidentielles de 2002, Lionel Jospin, avait perdu parce qu’il était trop modéré. Et que l’on ne pouvait profiter d’un taux de chômage désormais supérieur à 10 % qu’en agitant le spectre du « libéralisme » de Bruxelles dans une campagne dès lors dramatisée. D’où les invectives contre les « plombiers polonais » qui seraient en train d’inonder le marché du travail français (alors que, selon les estimations du Ministère du travail, les travailleurs polonais arrivés en France depuis le 1er mai 2004 ne seraient pas plus de 8 000). D’où une rhétorique digne du pire Le Pen, qui fait dire à un jeune chômeur de Marseille : « On ne s’en sort pas, on ne va pas encore ouvrir l’Europe à tout le monde ».

Mais derrière ce jeu de hasard aux dépens d’une Europe à présent – et qui sait pour combien de temps ? - bloquée, il y a un problème générationnel. Fabius appartient à cette génération d’après guerre qui n’a pas connu les horreurs et les difficultés qu’ont vécu les pères fondateurs de la construction européenne : De Gasperi et Adenauer, Mitterrand et Kohl. La génération de Fabius, à laquelle appartiennent même Chirac et Schröder passera à la postérité pour avoir d’abord accouché, puis maintenu en vie un traité de Nice qui grave dans le marbre l’Europe des égoïsmes nationaux et du déficit démocratique.

Génération Wilders

Le problème est que l’Europe du programme Erasmus et d’Internet, l’Europe des nouvelles générations – privilégiées parce qu’incluses dans le projet européen – se tait. Ainsi, elle laisse le champ libre à une nouvelle classe de démagogues : moins arrogants que leurs prédécesseurs, affables, amicaux –comme le trentenaire Olivier Besancenot, porte parole de la Ligue Communiste révolutionnaire en France. Ou comme le leader néerlandais du « non » à la Constitution, le quadragénaire peroxydé Geert Wilders. Sorti vainqueur du référendum du 1er juin, Wilders, qui séduit les électeurs avec le slogan « Les Pays-Bas doivent durer », réclame le titre d’héritier de Pim Fortuyn, le très controversé leader populiste et islamophobe assassiné en 2002. Opposé à l’immigration (« Les Pays-Bas sont déjà pleins »), critique vis-à-vis de l’euro, il incarne un style jeune tout en étant autant dangereux qu’un Haider ou un Bossi. Un style qui a en tout cas payé, si l’on en juge par le score du « non » néerlandais (61,6%) et par la participation (62,8%).

Et nous ?

Mais si elles veulent dire non à Wilders et à Fabius, au populisme trendy de droite hollandais et à la néo-xénophobie de gauche française, les nouvelles générations doivent faire émerger des alternatives démocratiques et transnationales – libérales ou réformistes – à la politique de la peur. Car, aujourd’hui, l’optimisme et l’ouverture, la clairvoyance, et le courage ne sont plus représentés sur l’échiquier politique. Devant l’urgence de ce nouveau défi, café babel se propose d’être le média capable d’accueillir ce débat refondateur.

On ne saurait encore croire à une Constitution rejetée par deux pays fondateurs. Retroussons-nous les manches.

Translated from Nuova generazione di leaders cercasi